Bonne fête Môman.

Dans ma REPpublique à moi, on célèbre, presque contre notre gré, des fêtes pétainistes. Pour le meilleur comme pour le pire.

Pas de collier de nouilles non.
Pas de trousse à maquillage non plus, jamais.
Pas de poème mièvre, sûrement pas.

Chaque année, la même question.
Chaque printemps, les mêmes prises de tête, en salle des maîtres.
Chaque fois, la même envie d’hurler que non, tu n’as pas d’idée mais surtout que, en fait, tu n’as pas du tout, mais du tout, envie de fabriquer quoi que ce soit.

D’abord, je suis maman, moi aussi.
Et moi aussi, j’ai un grand carton, au fond d’un placard, dans lequel je stocke, pour une période – soit dit-en passant – relativement courte, les fameux objets fabriqués avec (ou sans) amour sur une belle (ou pas) idée de la maîtresse en mon honneur.

J’ai ressorti le fameux carton, il y a quelques jours, justement. Je me suis dit que ça me donnerait peut-être des idées. Perdu.
Nous avons donc :
– Un tube de Springles reconverti en distributeur de coton à démaquiller.
Je ne me maquille pas.
– Un porte-bougie collé dans un pot de yaourt et peint de mille couleurs.
Je ne dîne jamais aux chandelles.
– Une carte sur laquelle un poème absolument niais a été collé par l’Atsem, poème que mon fils n’a jamais su me réciter.
Tant mieux.
– Un portrait de ma progéniture, qui fait un cœur avec ses doigts.
Je le vois tous les jours en vrai, je ne vois pas l’intérêt.

Bon, d’accord, je bougonne.
En vrai, je crois que je ne comprends pas vraiment l’intérêt de cette fête.
Je comprends d’autant moins pourquoi ça tombe sur nous, les maîtresses.
Qui a dit que la fête des mères, c’était un grand jour pendant lequel chaque enfant devait offrir à sa Moman l’objet (forcément moche) que sa maîtresse lui avait demandé de fabriquer ?
Quel est le rapport entre la fête des mères et l’école ?
Jean-Michel, dis moi, c’est écrit dans les programmes ?

« Non, mais bon, tu vois, on le fait tous, chaque année, alors, bon, si tu ne le fais pas, bon, tu vois »

Je vois oui. Je vais passer pour la méchante maîtresse. Aigrie (moi?), pas créative pour un sou, un peu flemmasse sur les bords. Je suis prête à tout assumer, mais quand même.

Alors voilà. Ce fameux cadeau, ils vont le créer eux-mêmes. Ils vont écrire des choses qu’ils pensent, qu’ils ressentent. Je vais les faire réfléchir, se confier, dire leurs sentiments, les vrais.

« Maman, ce que je préfère faire avec toi, c’est…. »

C’est joli, einh ?
Ce n’est pas de moi.
Ils commencent à gribouiller. Font la queue derrière mon bureau. Il faut que je corrige l’orthographe avant qu’ils ne recopient sur la jolie carte que j’ai préparée.

… Faire les courses.
… Faire la cuisine.
… Mettre la table.

Bien. Quelle belle image de leur maman ! Hum

Voyons un peu la suite.

« Maman, tu aimes quand je…. »

…. t’aide à faire le ménage.
….. débarrasse la table.
…. range ma chambre.

De mieux en mieux.
Je les interromps.
Tout le monde assis, il faut qu’on parle.

« C’est quoi, une maman, pour vous ? »

– Elle nous prépare à manger.
– Elle nous gronde quand on fait des bêtises.
– Elle nous achète des habits.
– Elle nous laisse jouer à la Play Station.

« N., tu l’aimes, ta maman ?
– Euh, bah oui, bien sûr maîtresse.
– Pourquoi tu l’aimes ?
– Parce que c’est ma maman.
– Oui, et qu’est-ce que tu aimes chez elle ?
Silence dans la classe. Yeux braqués sur N., qui commence à avoir les joues toutes rouges.
– J’aime quand.. euh, je ne sais pas si je peux le dire.
– Si, dis-le, N.
– J’aime quand, le soir, elle me prend dans ses bras, me serre fort et qu’on joue à « C’est moi qui t’aime le plus ! »

On y est.
On va pouvoir recommencer.
Il va être joli, très joli ce cadeau de fête des mères.
Finalement.

4 réflexions sur « Bonne fête Môman. »

  1. Je suis heureuse maintenant que je suis inscrite à la newsletter, je ne raterai plus jamais une chronique.

    Merci, les cadeaux de fête des pères ou mères me sucent la moelle. Ces poèmes à la con, où maman est cuisinière, infirmière, bijou, bisouille me sort pas les trous de nez. C’est ça être mère ? Je me pose la question car j’accouche la semaine prochaine de mon premier enfant.

    Puis papa il est en costume cravate sur sa carte de fête des pères et il est fort, il bricole etc etc.
    J’ai répondu à cette collègue que je respecte car elle a du se prendre la tête pour son cadeau de fête des mères, que j’espérais qu’un jour ma fille sera capable de dire, c’est pas ma maman ça. Maman c’est la libératrice d’araignées quand papa hurle debout sur le canapé, c’est la nana qui ne sait pas cuire des pates et qui chasse les monstres sous le lit.

    Enfin, maitresse de gommettes cet année (le cadeau semble encore plus obligatoire qu’avec mes cycle 3), on a fait (enfin ma remplaçante a fait) des porte clefs car les portes clefs j’aime bien, c’est pratique et on en a jamais assez. Donc je resterais toute ma carrière sur les portes clefs.

  2. Ce qui m’étonne, depuis quelques années, c’est de ressortir Pétain pour contourner le bricolage de la fête des mères !!!

    En Suisse, à côté de chez moi, les enfants bricolent pour la fête des mères et ils n’ont pas eu Pétain !!!
    En Allemagne, à côté de chez moi, les enfants bricolent pour la fête des mères, et ils n’ont pas eu Pétain !!!

    Le problème pour nos enfants et ceux de nos écoles, ce serait plutôt les situations particulières dans lesquelles les enfants vivent, c’est à dire les les familles désunies puis recomposées.

    1. Il arrive que les compositions des familles posent question dans ce genre d’activité en effet, mais plutôt pour la fête des pères, que je transforme personnellement en fête d’un homme qu’on aime.

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